EXPOSITION
7 mai – 6 juillet 2022
Louis Nucéra, un écrivain à vélo
Bibliothèque Louis Nucéra - Nice
Inauguration > Samedi 7 mai à 17 heures
Précédée de la conférence « Louis Nucéra, écrivain-cycliste » par Yvan Gastaut à 16h
En présence de Jean-Luc Gagliolo, Adjoint au Maire de Nice délégué à l’Education, au Livre, à la Lutte contre l’illettrisme et à l’Identité niçoise
& Suzanne Nucéra, épouse de Louis Nucéra
Bibliothèque Louis Nucéra
2, Place Yves Klein – Nice
En partenariat avec le Musée National du Sport
A l’occasion des 20 ans de l’inauguration de la bibliothèque Louis Nucéra, la Ville de Nice vous invite à découvrir l’exposition « Louis Nucéra, un écrivain à vélo » du 7 mai au 6 juillet 2022. L’inauguration se tiendra le samedi 7 mai à 17 heures en présence de Suzanne Nucéra. Elle sera précédée à 16h de la conférence « Louis Nucéra, écrivain-cycliste » par Yvan Gastaut, spécialiste de l’histoire du sport.
En hommage à l’écrivain niçois qui lui a donné son nom, la bibliothèque met en lumière la passion de Louis Nucéra pour le sport et en particulier le cyclisme auquel il consacra l’ouvrage Mes rayons de soleil. En parallèle de cette exposition, seront présentés également des objets personnels légués par la famille Nucéra au Musée national du Sport, dont un de ses vélos.
A VELO !
« Je suis venu au monde à l'ombre précaire d'une bicyclette suspendue entre ciel et terre. Celle de mon grand-père. Une bicyclette de marque Alcyon.
"J'ai voulu devenir champion cycliste, je n'ai pas réussi, mais je n'ai pas renoncé au vélo pour autant", répétait-il, comme si nul ne s'était aperçu de sa constance.
Parfois, il grimpait, un arc-en-ciel planté dans sa musette. Il avait plu. Le firmament redevenait radieux pour lui et l'auréolait à sa manière. Il arrivait qu'il consentît au repos. Il maraudait des fruits – les figues, quand elles se fendillaient et que leur suc perlait, avaient sa préférence – et s'allongeait dans un pré, le vieil Alcyon à portée de main. Des merles et des lapins chahutaient dans les buissons, l'alouette grisollait, frémissante dans le ciel, s'apprêtant à piquer, des sauterelles lissaient leurs pattes : il regardait.
"Ce qu'il faut, c'est essayer de ne pas mener une existence trop hostile à nos désirs, disait-il. Laisse-toi envoûter par le silence. Ça vaut le coup. Les petits bruits du vélo ne le troublent pas. On y puise émotion et réconfort."
J'ai écouté son conseil. Moi aussi, j'avais voulu devenir champion cycliste, mais le mot vainqueur était trop éminent pour moi ; je ne me classais obstinément qu'au-delà de cette ligne de démarcation fatidique où les journaux parquent les ratés du peloton les "et cætera" ! La compétition me boudait ? Tant pis. Ma décision fut prise. Je me vouerai au cyclotourisme ! Mon grand-père ne m'avait-il pas dit avec un sourire candide "Ainsi, nous ne nous ressemblerons que mieux ?"
A moi désormais les routes en solitaire à travers les champs nappés de lavande, les parfums d'eucalyptus, les fenouils d'honorable stature, les forêts, la boussole infaillible de la beauté et de l'effort sertie dans le guidon.
[...] Les départs à l'aube, quand aucun pas encore n'anime les rues, qu'une cloche résonne dans le calme, qu'un fragment de lune, menu comme une parenthèse s'apprête à quitter le ciel. Bientôt les choses se distinguent mieux. A regret, la nuit cesse de posséder la terre. Une frise mi-argentée mi-dorée couronne les crêtes. A vue d'œil, elle s'agrandit. Le petit matin descend de ramure en ramure. Il y a un moment, déjà, que les étoiles se sont éteintes. Des odeurs de champignons, de sève, de bois mort, d'humus en devenir embaument la route. Une bise subtile les agrémente de tout ce qu'elle ramasse en frôlant les cistes, les genévriers, les souches d'arbres fraîchement coupés, les aspics, les épineux genêts, les pâturages. Des éclats de soleil dansent de branche en branche. Des ruisseaux clapotent dans leur lit d'herbes penchées, de feuilles fanées, de reflets cristallins et de buées. Les chèvres n'ont même pas un regard pour le cycliste tant elles sont occupées à arracher, dans un mélange de délicatesse et de hâte, leur pitance aux arbustes et broussailles. Le berger n'est pas loin. Un rossignol s'estime sans égal et le prouve. Des geais se querellent : ils cajolent. En bas, la rivière taille la pierre : les gorges se font abruptes.
Chaque région a sa lumière ; roches, ardoises, chaumes, tuiles, bois s'harmonisent aux nuances grises d'ici, aux nappes éblouissantes d'autres endroits. Des touches de fleurs ornent les fenêtres. La civilisation est une longue patience. Dans les jours d'euphorie, il semble n'y avoir ni vent, ni douloureux surplomb, ni erreur de braquet, ni lassitude pour les vélocemen. Ils vont leur chemin et c'est un délicieux commerce avec des chérubins : ceux qui croisent par monts et merveilles. Le souffle du bonheur gonfle les poitrines et brave toute défaillance. L'infini est à portée de tous. »
Louis Nucéra
Panorama – Le Mensuel Chrétien – Mai 1990
BMVR – Bibliothèque Louis Nucéra
2, Place Yves Klein
04 97 13 48 90
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